Un homme marche sur la route menant à un cirque. Il fait nuit noire, le ciel est nuageux, on ne voit pas la lune. L’homme qui marche s’appelle Éric, il est le dirigeant du cirque. Il croule sous les dettes, seules quelques personnes viennent encore voir son spectacle. La banque lui avait dit qu’il devait arrêter le cirque. Mais lui, il ne pouvait s’y résigner. Ce cirque était tout ce que lui avait légué sa famille. Mis au pied du mur, il avait finalement accepté de vendre, il l’avait annoncé aux comédiens mais tous avaient rejeté cette décision et s’étaient rebellés. Alors ce soir, Eric s’approche du chapiteau et il a un briquet Zippo dans sa poche. Dans la main droite, il serre un bidon d’essence.
Il arrive devant le grand chapiteau, il commence à en faire le tour, tout en versant de l’essence au pied de la grande tente.
Éric pleure, C’est un déchirement, au fond de lui, il ne veut pas faire ça. Il a maintenant fait le tour, il sort le briquet de sa poche, il l’allume et le jette au bas du chapiteau. Il n’a pas le temps de regarder ce qu’il se passe : il est contraint de courir pour échapper aux flammes. Il a parcouru cinquante mètres quand il se retourne, une énorme boule de feu jaillit du sommet du chapiteau. Brusquement, tout ce qu’il pouvait redouter de pire arrive, la structure du chapiteau s’effondre et tombe enflammée sur les caravanes des comédiens. Eric, foudroyé par l’horreur, tombe à genoux et regarde la scène complètement impuissant. Un cri déchire le bruit singulier du brasier. La porte d’une caravane s’ouvre, un des comédiens en sort, il regarde Éric :lire . Celui-ci se retourne et au même instant, une poutre écrase le comédien et le tue.
Horrifié, Eric court sur le chemin pendant plus d’une trentaine de minutes. Enfin, il arrive devant sa petite caravane. Il reste devant et réfléchit. Il voudrait revenir en arrière, ne plus penser à tout ce qu’il s’est passé mais à présent, il sait que ces images le hanteront jusqu’à la mort.
Eric sort une clé de sa poche et il l’insère dans le cadenas qui ferme la porte sans poignée de la caravane. Il tire la porte, entre puis referme le verrou. Il se dirige vers le robinet, il l’ouvre, une eau tiède et brunâtre en sort, il plonge ses mains dans le liquide et en asperge sa tête. Il va s’asseoir sur son lit, il plaque ses mains sur son visage et il pleure pendant plusieurs minutes.
Pourquoi a-t-il fait ça ? Pourquoi tout ne s’est pas passé comme il le voulait ? Comment les choses ont-elles pu dégénérer ainsi ?
Tant de questions qui torturent son esprit. Un cri perçant le sort de ses pensées, il tourne la tête, regarde dans tous les recoins de la petite pièce, mais il ne voit rien. C’est sûrement son esprit qui lui joue des tours. Éric se rendort.
Le lendemain matin, il se réveille, il se dirige vers le petit placard. Il l’ouvre et regarde à l’intérieur, une forte odeur de brûlé s’en dégage. Il se dit que c’est sûrement une coïncidence et qu’il n’a aucune raison de s’inquiéter. Il prend des cornflakes et s’assoit sur le canapé, il mange ses céréales tout en regardant la télévision. Et là, c’est l’horreur ! Un envoyé spécial se trouve devant le chapiteau calciné. Le présentateur reprend l’antenne et annonce les chiffres : 12 morts, aucun survivant. Bric saisit la télécommande et éteint brusquement la télévision. Il s’avance vers la salle de bains pour se raser, il prend la mousse s’en applique sur le visage. Il prend son rasoir, commence à se raser et là, surgit dans le reflet de son miroir la tête d’un des comédiens maquillé en clown, le visage défiguré par des brûlures. Éric hurle de peur puis il se retourne : personne, il n’y a personne derrière lui !
Éric est désorienté, il va se recoucher. Quelques heures plus tard, il se lève, il décide d’aller prendre l’air dehors quelques minutes et fumer une cigarette. Il tire sur le verrou et passe à l’extérieur. Une horrible surprise l’attend, un cercle d’herbes calcinées entoure la petite caravane. Éric rentre à l’intérieur, bloque la porte avec une chaise et ferme les stores.
Il inspire un grand coup, regarde autour de lui et va se recoucher pour dormir une bonne partie de la journée. Vers deux heures de l’après midi, il se réveille difficilement, ouvre une boîte de cassoulet en conserve et la fait cuire.
Vers deux heures et demie, il a fini son cassoulet, il va s’asseoir sur son canapé pour réfléchir.
Quelques minutes plus tard, Éric entend au loin le son de la sirène des gendarmes, vite, il éteint les lumières et s’allonge à terre.
On frappe à la porte, Éric ne fait rien, on frappe à nouveau à la porte plus fort encore, Éric est contraint d’ouvrir la porte sinon les gendarmes vont l’enfoncer et il aura encore plus de problèmes. Il ouvre la porte et là, il est saisi d’effroi, un clown crie "Bou !" puis il rit d’un rire démoniaque et disparaît brusquement ainsi que la voiture de gendarmerie.
Éric est sous le choc, il saute dans son lit se réfugier, il en a assez de ces hallucinations. Il pense que demain sera probablement un jour meilleur, puis il cherche l’heure : il est seulement trois heures moins le quart ! Il va regarder la télé tout le reste de la soirée pour se détendre, même s’il est toujours terrifié d’être en proie à des hallucinations. A minuit moins le quart, il va
se coucher en ayant l’espoir que le lendemain sera un jour meilleur.
Il est dix heures trente-cinq quand il se lève, il va s’asseoir à table, boit un verre d’eau, puis s’affale sur son canapé. Il prend un bol de cornflakes, il verse les céréales dans le bol, mais ce ne sont pas des céréales qui atterrissent dans son bol mais des braises encore chaudes.
Éric n’en croit pas ses yeux, il prend le bol et le jette violemment contre la paroi de la caravane. Il s’avance vivement vers la cuisine, va prendre un verre d’eau. L’eau qui jaillit du robinet est terriblement chaude, même en réglant le robinet sur eau froide, la température de l’eau ne diminue pas.
Il va dormir, c’est son seul moyen pour échapper aux hallucinations, si s’en était...
Il se réveille vers quatre heures et demie, il sent un forte odeur de gaz, il s’avance vers le salon. Sur la table, dans le grille pain, un journal est en train de s’enflammer.
Il a juste le temps de sortir de sa caravane et de courir un dizaine de mètres que la réaction chimique opère, la caravane explose dans un grand brasier.
Éric se retourne et voit tout ce qui lui reste partir en fumée et en ruine. Il décide de courir, courir pour oublier, il court pendant une trentaine de minutes.
Il arrive en ville hors d’haleine, il marche regarde les vitrines, ça le détend.
Il arrive dans une boulangerie, achète un croissant, sort le manger dehors, il sent toute son angoisse disparaître.
Il continue à marcher en regardant les boutiques, mais soudainement il s’arrête devant une vitrine. Le reflet de tous les comédiens qu’il a tués est face à lui. Ils sont en train de le regarder. Pour mettre fin à cette vision d’horreur, il prend son briquet dans sa poche et le jette de toute ses force dans la vitrine.
L’effet désiré n’est pas obtenu, pas du tout, tous les comédiens jaillissent de la vitrine. Des clowns, des acrobates, des dompteurs de tigre se mettent à le poursuivre. Éric court, il court plus vite que son corps le lui permet normalement. Il trébuche, mais se relève rapidement, il se faufile dans les petites ruelles de la ville. Ses anciens compagnons le poursuivent encore avec férocité. Il arrive sur le port, il court vers la pointe, avec le petit espoir d’échapper à ses poursuivants. Mais surgissent, à quelques mètres de lui, deux clowns. Il est contraint de s’avancer sur un des pontons qui bordent l’eau, il progresse jusqu’à son extrémité. Les douze comédiens courent vers lui, un clown commence à l’étrangler et le précipite dans l’eau avec lui. Après une vingtaine de secondes à se débattre, Éric meurt avec le sentiment d’être quitte envers les comédiens.