“- C’est l’heure du repas !”
“- Je ne suis toujours pas mort.”
Je suis ici, dans cette piéce vide depuis trois ans je crois. Je dis je crois car ici, dans cette cellule le temps passe, mais on ne le sait pas vraiment, les journées se ressemblent, ce sont toutes les mêmes, les repas sont les mêmes, servis à la même heure. On a l’impression de revivre la même journée encore et encore. Encore ce silence, encore cette pièce. D’ailleurs le gardien vient de me l’apporter mon repas. ( Midi , soir ? )
Je lui ai demandé un jour pourquoi il disait toujours "C’est l’heure du repas !" avant de faire passer le plateau dans la fente de la porte en métal, et il m’a dit que le jour où un des prisoniers ne répondra pas, c’est qu’il ne lui répondra plus jamais, quelle que soit sa réponse. Alors maintenant quand il me le redit, je lui réponds " Je ne suis toujours pas mort."
Au fait, vous devez vous demander pourquoi je suis là ... C’est simple , je suis ici pour quelque chose que je n’ai pas fait. J’ai été accusé d’avoir assassiné ma femme et mes deux filles. Et vu que je défendais serieusement que j’étais innocent, il en ont conclu que j’étais coupable ( logique ). De toutes façon je n’aurais pas pu continuer à vivre dehors sans elles, elles étaient... Ma raison de vivre. Peut être qu’ils m’ont enfermé pour ça, éviter un sucide. Ils m’ont donc condamné à l’emprisonement à perpétuité ou je ne sais plus trop quoi. Enfin bon le fait est que je suis ici. Maintenant.
Comme tous les jours rien de ce qu’il n’y avait sur mon "plateau repas" n’avait l’air appétissant. Une assiette à moitiée vide de purée de je ne sais quoi, une pomme, un morceau de pain presque rassis et un gobelet d’eau. La pomme était déja épluchée et préparée car je n’ai droit qu’à une petite cuillére pour manger mon repas. Jamais je ne verrais un couteau , une fourchette ou n’importe quel object pointu posé sur un de ces plateaux. Ils me considérent vraiment comme un psychopathe. Mais vous savez, c’est a force de considérer les gens pour ce qu’ils ne sont pas qu’ils le deviennent.
Je ferais mieux de manger ma purée avant qu’elle ne soit froide et qu’elle devienne encore moins mangeable.
Ce repas était vraiment affreux, enfin bon à force, vous savez on s’habitue...
Ils ne vont pas tarder à venir récupérer mon plateau vide. En attendant je m’assois sur mon lit. Il est vieux, très vieux. Le matelas a pris avec le temps une couleur jaunâtr , ma couverture est surement pleine de bestioles microscopiques et mon oreiller ne ressemble même plus à un oreiller...
Au début ca m’écoeurait, mais comme tout, on finit par s’habituer. Je suis donc là assis sur mon lit , a réfléchir encore et encore. Je réfléchis beaucoup depuis que je suis en prison, aprés tout je n’ai pas grand chose d’autre à faire ...
Je regarde les murs, qui sont d’ailleurs assez propres pour être des murs d’une cellule. Mais il ya quand même dans le coin prés de mon lit la peinture qui s’effrite. Par réflexe, je me lis à arracher le petits morceaux de peinture séche qui étaient sur le point de tomber. Comme quand j’étais gamin, ah quand j’étais gamin...