À l’époque de l’écriture de la nouvelle, Mérimée était en voyage dans le midi de la France. En effet, en 1834, il fut nommé inspecteur général des monuments historiques et antiquités nationales. Il visite de nombreuses régions de France et s’intéresse aux antiquités. A ce titre, il séjourna dans le Roussillon où il écrivit La Vénus d’Ille.
Considérée par Mérimée lui-même comme son chef-d’oeuvre, La Vénus d’Ille reçoit un accueil favorable de la critique. Seul Stendhal reproche à l’auteur quelques négligences de style et une certaine sécheresse.
Cette nouvelle s’inspire tout à la fois d’une littérature plus ou moins ancienne traitant du thème de la statue animée (à commencer par le mythe de Pygmalion créant Galatée, raconté par Ovide), et des propres souvenirs de l’auteur accumulés lors de ses séjours dans le sud de la France.
Il aurait également pu être inspiré par une énigmatique statue la « Vénus de Quinipily » qu’il avait vue à Baud (Morbihan).
Quelques jugements sur Mérimée et ses nouvelles
Mérimée, agnostique et qui n’a jamais été baptisé, nourri de Voltaire, des Encyclopédistes et des Idéologues, rivalisant avec son ami Stendhal de sarcasmes contre l’Eglise, les prêtres et toutes les religions, affichait l’impiété, un matérialisme intrépide, une confiance hautaine dans la science et la raison. En fait, il n’est sûr de rien, il est torturé par le doute, obsédé par une présence qu’il n’appelle pas Dieu parce qu’il se refuse au dogme comme à la révélation, mais qu’il décèle dans les forces mystérieuses de l’Univers, dans la toute puissance du destin, dans l’innommable comme dans l’ineffable . Stendhal, lui, n’avait aucune inquiétude religieuse ni métaphysique : aussi n’a-t-il jamais écrit de conte fantastique . Pour en rêver, ne fût-ce qu’un seul, il faut avoir le sens du mystère, de l’au-delà, d’une transcendance de quelque nature qu’elle soit.
Marcel Schneider, La littérature fantastique en France, Fayard, 1964
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Il sait faire vingt pages, où les romantiques s’évertuent à souffler un volume. Aussi quelle plénitude dans cette brièveté. Un paysage est complet en cinq ou six lignes. Les caractères se dessinent par une action significative, que le romancier a su choisir en faisant abstraction du reste...
Il est simple aussi : ni sensibilité, ni grandes phrases ; un ton uni, comme celui d’un homme de bonne compagnie qui ne hausse jamais la voix. On peut imaginer l’effet de cette voix douce et sans accent quand elle raconte les pires atrocités. Car Mérimée est "cruel", il conte avec sérénité toutes sortes de crimes, de lâchetés et de vices, les histoires les plus répugnantes ou les plus sanglantes ; ne croyant ni à l’homme ni à la vie, il choisit les sujets où son froid mépris trouve le mieux à se satisfaire
Gustave Lanson, Histoire de la Littérature française, 1894, Hachette
– Prosper Mérimée : un génie singulier par Mme Hélène CARRÈRE D’ENCAUSSE
– MÉRIMÉE ET L’HISTOIRE. M. Xavier Darcos
Source bibliographique
– Thierry Ozwald, Colomba, La Vénus d’Ille (Nathan)
– Michel Viegnes, Colomba, La Vénus d’Ille (Hatier)
– Kléber Haedens Une Histoire de la Littérature française, Grasset 1970
– Dictionnaire de la Littérature française du XXème siècle (Albin Michel, Encyclopaedia Universalis)
– Le Robert des Grands Ecrivains de langue française
– A voir. "Les Règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Seuil, 1992 de Pierre Bourdieu